Guy de Lussigny

Guy de Lussigny s’inscrit dans la lignée d’artistes illustres comme Mondrian, Malevitch, Herbin qui décomposent la toile en formes colorées jouant sur les rythmes plastiques et les équivalences formelles. La perception visuelle d’une couleur est toujours relative et n’est jamais perçue comme elle l’est physiquement de manière « réelle ». Gunilla Lapointe sur Guy de Lussigny



Repères biographiques :

Guy de Lussigny est né à Cambrai (Nord) en 1929. Il commence à peindre dès1950, s'inscrivant dans la lignée de Mondrian, Malevitch ou Auguste Herbin qui décomposent la toile en formes colorées jouant sur les rythmes plastiques et les équivalences formelles. Privilégiant la ligne droite, le carré et la couleur, Lussigny crée à partir d’un langage plastique sobre et précis, une peinture faite d’élégance, de discrétion et de poésie. En 1955, il rencontre le futuriste italien Gino Severini qui l'encourage. L’année suivante, la rencontre d’Herbin est déterminante. Les deux artistes prennent des libertés avec les théories des couleurs et décuplent ainsi les potentiels de la composition abstraite. Lussigny sera également influencé par Albert Gleizes, Paul Klee et Delaunay. Une première exposition personnelle du travail de Lussigny est organisée à la Galerie Colette Allendy (Paris) en 1960. Il exposera en France et à l’étranger (Italie, Belgique, Suisse, Pays-Bas, Japon). Guy de Lussigny s’installe à Paris en 1967 et participe à de nombreux salons : Grands et Jeunes d'aujourd'hui, Réalités Nouvelles, Comparaisons. De 1969 à 1975, il travaille aux côtés de Denise René (Paris) dont le but est de rendre accessible à de nouveaux publics la création la plus contemporaine . En 1974, Lussigny se lie d’amitié avec le peintre italien Antonio Calderara. En 1989, le livre Traversée des apparences »est publié par les Editions OCD (Paris) avec 4 sérigraphies originales de l’artiste. En 1996, Lussigny reçoit le Prix Dumas-Millier attribué par l'Institut de France et l'Académie des Beaux-Arts. Le Musée des Ursulines (Mâcon) organise en 2000 l’exposition « Peinture 1977-2000 », exposition reprise en 2001 par le Musée des Beaux Arts de Cambrai, sa ville natale. Les œuvres exposées mettent en évidence les liens entretenus par le peintre avec l'Abstraction géométrique. Guy de Lussigny est mort à Paris en 2001. L’artiste, qui a également réalisé des cartons pour la tapisserie, aura pratiqué une abstraction rigoureuse, laissant « flotter » sur des fonds monochromes des formes géométriques élémentaires, principalement le carré et la ligne. A la recherche de l’équilibre et d’une harmonie tout en nuances, ses œuvres invitent à la méditation.

Presse :

Guy de Lussigny
Noir-blanc-rouge : pour peindre la lumière


C’est la première exposition à Paris depuis la disparition du peintre en 2001. Dans la continuité du néoplasticisme, Guy de Lussigny - né à Cambrai - s’est doté d’une vocation géométrique qu’il a développé avec rigueur et une détermination qui n’ont jamais faibli. Pour parvenir à une nouvelle réalité plastique, son langage intuitif et empirique s’appuie sur la couleur. Posées par couches successives jusqu’à l’obtention d’un champ monochrome, jaune, rouge, bleu, blanc ou noir, auquel il demande d’exprimer la pure lumière, elle garde une totale autonomie et diffuse une spatialité lumineuse et vibratoire. Le choix tonal s’est porté sur des peintures, acryliques et gouaches - celles-ci, qui n’nt jamais été montrées, avaient toutes l’admiration d’Aurélie Nemours - de la série des noir, blanc, rouge. Sur un format carré, la forme primordiale de l’univers selon Malevitch, Lussigny explore les rapports entre la matière et l’espace. Son travail en profondeur atteint une qualité spirituelle par le glissement imperceptible de carrés, de segments interrompus de droites et d’horizontales sur le fond devenu immatériel. Ce jeu silencieux installe des accords stables aux multiples tensions. Dans cette logique interne, chaque œuvre présente une densité picturale particulière. La couleur joue le rôle de stimulateur. Parvenue à une saturation maximale, elle est travaillée par superposition de peinture en glacis ou sur la pluralité des tons afin de parvenir à des variations où la forme des figures naît des teintes contrastées, dispense une puissance énergétique qui submerge le plan du tableau. Sur la couche picturale travaillée d’un pinceau sensuel, les mélanges subtils suggèrent une autre réalité. Celle de la peinture. Sa double identité, esthétique et charnelle, installe un dialogue musical et mystique pour l’émergence d’un ordre qui serait celui de l’harmonie et de l’absolu. En 2005, André le Bozec a fait don au musée Matisse du Cateau-Cambresis de trente-deux peintures et cinq séries de dessins. Cette donation fait suite à celle que le collectionneur a effectuée à Cambrai en 2003.

Lydia Harambourg
Gazette Drouot n° 1 du 11 janvier 2008 (page 138)

Carte Blanche à André Le Bozec

Collectionneur, André Le Bozec présente la particularité d'avoir privilégié l'art concret. Depuis ses premiers achats auprès d'artistes auxquels il est resté fidèle - sans négliger ceux qui prenaient la relève -, il a constitué un ensemble assez rare, d'une exigence qui répond à la rigeur et à l'équilibre qui identifient cet art. La carte blanche qui lui est offerte par le LAAC de Dunkerque (www.MuséesDunkerque.wb.st) témoigne, face à sa donation d'un ensemble de peintures et de dessins de Guy de Lussigny (1929-2001), dont il est l'exécuteur testamentaire et à qui un hommage est ainsi rendu. Ces oeuvres datées entre 1972 et 1993 témoignent de la démarche de l'artiste. Des carrés dialoguent avec la surface, adoptant elle-même le carré fondateur. Le recours à la sérialité entraîne des variations par couleurs dont il interroge la vibration par interactions. Il positionne le carré dans l'espace, régulé par une horizontale, puis par des segments qui stabilisent la composition. Avec la répétition des figures, l'attention que Lussigny porte aux intervalles a pour conséquence un équilibre, une harmonie qui traduisent une ferveur toute particulière, notamment grâce à un travail du pigment posé en fines couches d'acrylique translucide. Repris jusqu'à l'obtention de nuances, les glacis introduisent des cadences, des contrastes perçus comme l'élément prioritaire de notre perception. Menées dans la rigueur, ces images mentales ouvrent sur un imaginaire. La lumière sous-tend ce qui ne procède jamais de calculs dans une recherche qui s'inscrit à la suite de Malevitch. 
La carte blanche à André Le Bozec lui permet de faire dialoguer quelques oeuvres de sa collection avec celles des collections du LAAC. Elles sont réparties en sections articulées sur plusieurs thématiques, celles de "l'abstraction réalité", "l'espace couleur", 'le noir et blanc", "le noir, blanc, bleu", "l'évènement dans l'espace" et "la mobilité de l'oeuvre / mobilité de l'oeil" . On y voit Herbin, Heutaux, Aurélie Nemours, Geneviève Claisse, Ode Bertrand, Andreas Brandt, Marcelle Cahn,... Ces artistes déclinent un enjeu pictural dans un langage où la forme et la couleur concrétisent une intuition, une poésie pour atteindre "la pureté de l'unité esthétique" selon Vantongerloo.

Lydia Harambourg
Gazette Drouot n° 28 du 18 juillet 2008 (page 93)


Bibliographie :

* « Spazio e colore di Guy de Lussigny », G. Franzoso et J. Lassaigne, Cat. expo, Studio V, Vigevano (Italie), 1974
* « G. de Lussigny, Traversée des apparences », Cat. expo, F. Vitoux, Otto Hahn et autres,
Ed. ACD Productions, Paris, 1981 (Voir ci-contre)
* « Peinture 1977-2000 », Cat. expo, Musée des Ursulines, Mâcon, 2000
* « Collection André Le Bozec », V. Burnod et N. Surlapierre, in Petit journal du Musée de Cambrai, Cambrai, 2003
* « L’Abstraction géométrique vécue », Gunilla Lapointe, Ed. Musée de Cambrai, in La Lettre Mensuelle,
Fev. 2004