"Mon père avait un frère qui s'appelait Albert. C'était mon oncle de Carpentras. On disait qu'il avait la maladie du carré. On l'appela Albers lorsqu'il devint plus tard mon oncle d'Amérique. C'est à lui que ces fenêtres sont dédiées." - René Guiffrey
Repères biographiques :
Emotionnelles,
intenses et insolites toujours pertinentes les œuvres de René Guiffrey parfois
monumentales évoquent le monde du visible et de l’imprévisible. Elles
traduisent un langage inédit autour desquelles scintille une transgression
subtile au silence.
Né
à Carpentras, Vaucluse, le 14 mai 1938 René Guiffrey vit et travaille à Bédoin
(84).
Dès
1963 se succèdent des expositions : Japon, Yougoslavie, Allemagne, Italie
ainsi qu’en France.
Dès
1989 le travail de René Guiffrey s’applique à de nouveaux outils – le verre,
l’eau – Les commandes d’œuvres monumentales dont les sculptures fontaines à
Toulon et Vaucresson, la colonne « lola » à Nantes (voir photo ci-contre) ou
encore le bassin hollographique à Vaucresson lui permettent d’accéder aux
techniques industrielles.
René
Guiffrey dit : « Je me suis toujours efforcé, pour chaque œuvre
monumentale que j’ai réalisée, de l’investir d’abord des mêmes préoccupations,
des mêmes partis pris esthétiques que ceux qui régissent toutes ses autres
œuvres. Le matériau verre et sa transparence – celui que j’ai le plus sollicité
– le blanc, le cube ou le carré, n’ont servi que de support au vent, au soleil,
à l’eau bien sûr, à tous ces éléments qui sont spécifiques des œuvres
d’extérieur ».
Peut-on
nous autoriser à penser que ces œuvre « verre-miroir » sont comme
l’autoportrait du monde : tout l’environnement s’y réfléchit.
«
A propos de poussières et de surfaces : sur toute surface blanche, peinte
ou émaillée au dos d’une plaque de verre, vient souvent s’incorporer, lors de
son exécution, une myriade de particules, parasites infimes , imperceptibles
souvent, mais parfaitement visibles d’autres fois, qui altèrent ainsi la pureté
apparente, orgueilleuse de cette surface – tu disais : « hautaine
parfois », « glacée » disait l’autre.
(«Pureté »,
soit dit en passant, que certains croient quelquefois trouver dans mon œuvre,
qui, m’en faisant le compliment et s’imaginant ainsi me satisfaire, seraient
bien surpris de savoir combien cette notion de pureté m’emmerde tout au
contraire). Il s’agit le plus souvent de poussières ou d’impuretés de l’air
ambiant mais parfois aussi de petits accrocs, de décollements de la couche
peinte, de légers éclats ou de rayures de la plaque de verre elle-même.
J’ai
toujours fait une très grande place à ces parasites de l’œuvre. Je n’irais pas
jusqu’à dire que je leur assigne une fonction politique ou subversive mais ils me
paraissent indispensables pour insuffler à l’œuvre cette autre parcelle de vie
dont elle a besoin, sa partie biologique en quelque sorte.
Lors
de la fabrication du cube « Nantes », de nombreuses bulles d’air se
sont formées dans la pellicule de résine, ce que les verriers appellent des « fougères »
et qu’ils qualifient volontiers de cancer du verre. Il m’a paru qu’au lieu de s’attrister
d’avoir produit un bloc de verre, certes contaminé par un virus, il convenait
au contraire de se réjouir qu’il soit si vivant qu’on pourrait un jour en
apprendre la mort. »
René
Guiffrey
Maurice
Benhamou – Entretiens avec René Guiffrey (Extrait)
Bibliographie :
- René Guiffrey ou l'effroi du beau, Bernard Privat - 2007 - catalogue d'exposition "le monde blanc", Geneviève Bonnefoi - 2003 - entretiens avec René Guiffrey, Maurice Benhamou - Editions Romagny, 1997 - entretiens, mars 1983 - Jean-François Lyottard, revue Point à la ligne,1985-1986